La rentrée
Fut difficile…et les conteurs que nous sommes étaient en pleine panne d’inspiration! Que dire de ces longs mois qui se sont écoulés, pendant lesquels nous avons repris racine en France, grandement soutenus par la famille et les amis!?
Nous nous sommes d’abord installés à La Rochelle près du plus grand port ou dortoir de bateaux de la côte ouest, prêts à changer de vie et de métiers – pour « être de la partie » comme on dit…
Et bien que nous ayons suivi quelques pistes sérieuses, et certaines un peu moins allant même jusqu’à postuler comme « Maître de port » à Bourcefranc-le-Chapus (non non, c’est vrai…) s’avérant dédié principalement à l’ostréiculture (en effet, je n’y connaissais pas grand chose:) , nous n’avons pas vraiment rencontré l’opportunité de nos rêves!
Avons-nous tout essayé? Non, sans aucun doute, toujours est-il que nous sommes repartis sans regrets et plutôt déçus de la petite, très petite, bourgade de province humide et isolée au beau milieu de kilomètres de cultures aussi longilignes et plates qu’ennuyeuses et monotones! Cela malgré le plaisir infini de déguster des huîtres en chaleureuse compagnie assez régulièrement au bord de l’océan et de la Charente!
Durant ces longs mois de vagabondage spirituel voire existentiel, mon beau Takoumi, lui, a trouvé un nouveau propriétaire: une femme américaine et son compagnon, sans aucune expérience de la voile, prêts à lui refaire peau neuve et à se projeter dans le rêve…Ce rêve que nous avons eu la même volonté et grande chance de vivre qui pour nous est à présent réalisé…Je leur souhaite de beaux moments d’aventure dans leur navire que vous savez capricieux mais exemplaire.
Mais, j’en profite pour mettre le doigt sur l’exact problème du retour de notre voyage: lorsque vous venez d’accomplir un si grand rêve dessiné depuis plusieurs années, qui par bien des côtés n’est pas tout à fait achevé, comment nourrir de nouveaux projets??? En fin de compte, j’ai conscience aujourd’hui que nous n’avions jamais planifié notre retour. Sans doute parce-que si nous l’avions fait, nous ne serions pas partis – et à grand tort vous serez tous d’accord!!!
Certains de nos amis lecteurs ne l’avaient pas prévu non plus d’ailleurs, aussi auprès d’eux, nous vous demandons sincèrement pardon d’être rentrés. Ce faisant j’ai le sentiment que nous avons perdu beaucoup de temps les premiers mois, à chercher de nouveaux projets tout en profitant de notre nouvelle mobilité pour traverser la France quelques fois déjà.
Les moments formidables: les weekends et Noël en famille, le ski malgré un vrai manque de savoir-faire et des douleurs musculaires inconnues des marins, l’ULM et la super-tyrolienne, les soirées et barbecues avec les copains, la montagne, les bonnes tables et les marchés bien achalandés, le cinéma en VO et en VF, les sorties « Surprise » sur le lac Léman et une belle partie de pêche en Méditerranée…
Les moments « bof »: l’hiver humide, la solitude, la pauvreté, la misère urbaine, les nouvelles normes d’agressivité, l’individualisme, le « moi d’abord », la fermeture d’esprit, l’absence d’écoute et tout ce brouhaha ! Le métro, le vis-à-vis, la disparition du silence et du ciel, le manque cruel d’horizon…Non, le retour est une épreuve et la bataille intérieure que je mènerai toujours est de continuer à regarder le ciel, garder l’esprit et le regard ouverts, ne jamais baisser les yeux pour refuser de voir tout cela, tout en reprenant une routine citadine infiniment pratique et confortable. Le voyage m’a permis de croire que tout est possible, qu’il y a de la beauté et que les équilibres parfois pernicieux sont présents partout. La société elle-même en est un très bel exemple mais voilà un tout autre sujet à l’ordre d’un autre jour!
Donc, je racontais…plutôt confus et plein de réflexion, débordés par l’abondance à la fois de contraintes et de choix que nous avions, Olivier et moi avons d’abord tenté l’expérience Rochelaise plusieurs mois. Et depuis Janvier nous avons élu domicile à Paris d’où nous pouvons rayonner toute la France. La recherche de nouveaux projets s’est peu à peu transformée en recherche d’activité et plus simplement de travail tout court. Il n’y a pas beaucoup de rêve dans tout ça et c’est bien normal, l’ambition nouvelle n’est-elle pas simplement de nous réinstaller dans cette routine terrienne, entourés de ceux avec qui nous l’avons un temps partagée ? Voilà, le voyage est bel et bien fini en ce qui me concerne mais je ne me résous toujours pas à ne pas penser, à ne pas rajouter « pour l’instant »!