La saison passée, la descente des îles de Floride avait été menée tambour battant pour cause de retard sur le planning de navigation. Cette année, nous quittons Key West avec la ferme intention d’en profiter et de découvrir de nouveaux endroits.
Comme annoncé, le premier jour de la remontée est exempt de vent. La bonne surprise viens de l’absence de pluie … elle aussi prévue.
C’est ainsi que nous rejoignons presque intégralement au moteur notre première étape. Le sanctuaire de Looe Key, un reef en limite de hauts fonds au large des Big Pines Key où l’année dernière nous avions eu peine à trouver un ancrage. D’ailleurs, ce champs de bouées en pleine mer n’est pas notre objectif d’origine, mais comme nous sommes désireux de profiter le plus possible du sanctuaire marin, nous nous y installons pour la nuit au prétexte de poursuivre notre exploration du récif au lendemain matin.
Si la mer salue notre décision en nous accordant une nuit confortable et peu agitée, le ciel nous punis de notre témérité en déchaînant au dessus de nos têtes la foudre et les ondées et je ne peux m’empêcher de penser que cette nuit d’orages est une bien singulière mise en jambes pour notre invité. Au moins les travaux entrepris au Panama ont-ils portés leurs fruits dans la mesure où la cabine avant reste désormais sèche.
Nous y faisons de belles rencontres avec la faune, car si le récif est peuplé de poissons coralliens, il héberge aussi au moins un requin de taille raisonnable ainsi qu’un poisson géant (ou Mérou Goliath) auprès duquel un nageur humainement proportionné se sent immanquablement tout petit, vraiment tout petit !
Je conserve de l’étape suivante, qui nous mène à Marathon, l’image de grandes étendues d’algues couleur rouille-orangée qui, jusqu’au plus prés, ressemblent à si méprendre à d’improbables langues de sables où les oiseaux viennent se reposer. Persuadé de courir à notre échouage, j’en évite un nombre certain avant de me rendre compte qu’il est tout à fait possible de les traverser.
L’escale, au sein du champs de bouées de la marina publique, est un havre de paix. Le plan d’eau est calme et l’excellent restaurant « Fisheries » subvient à nos besoins solides et liquides dans un décors de fin d’après-midi baigné par les derniers rayons du soleil couchant.
Globalement une merveilleuse escale, si ce n’est l’accès trop peu profond du bassin : Si l’entrée se fait sans douleur, mais avec un peu d’anxiété tout de même, la sortie est se montre nettement plus retorde et il nous faut 3 essais avant de trouver un cheminement compatible avec notre tirant d’eau … une épreuve stressante dont nous nous passerions volontiers au début d’une nouvelle journée.
Les locaux de la marina sont curieusement agencés avec une pièce d’accueil commune de la taille d’un entrepôt sobrement mais confortablement aménagé avec de nombreuses tables, des alcôves « télévision » équipées avec de bon fauteuils et d’autres zones réservées à la lecture.
Intérieurement, Manuela et moi sommes un peu chagrin de ne pas pouvoir en profiter plus longtemps, mais il en va des équipiers « terriens » comme des voitures de location : Il faut bien respecter le planning et les ramener en temps et en heure à l’aéroport 😉
Peu de choses viennent troubler notre navigation « brise Perkins » jusqu’au mouillage de Lower Matecumbe Key dont nous avions déjà profité l’année passée. Par contre, parfait exemple des souvenirs qui subliment les lieux visités, j’avais en tête une image très naturelle de cette côte alors qu’en fait, la petite portion de mangrove au devant de laquelle nous mouillons est très sévèrement encadrée par la civilisation.
Nous plaçons la journée suivante sous l’augure des manœuvres de marine « qu’il est bien d’expérimenter mais qu’on ne fait jamais parce qu’il conviens aussi de s’économiser » 😉
Comme nous disposons d’une paire de bras supplémentaires, autant en profiter pour établir le génois tangoné au portant que je regrette de ne pas avoir utilisé plus souvent et empenneler une seconde ancre au mouillage que je suis bien heureux de … ne pas avoir eu à utiliser avant.
Ce que je retiens de cette technique qui consiste à ajouter une ancre sur la chaîne de mouillage, c’est, dans notre cas présent, son inutilité … Nous bataillons et jouons les gros bras une heure durant dans un vent soutenu pour le voir radicalement mollir dans les minutes qui suivent la fin des opérations. Il y aura bien pas mal de pluie dans la nuit, mais rien qui justifie la mise en œuvre d’une technique de mouillage sensée maintenir fermement le bateau par 40 noeud de vent et plus de 10 mètres de fond.
Au moins pouvons nous dire avoir empennelé une fois au cours de trois ans de voyage, parce qu’en ce qui concerne le mouillage de Rodriguez Key, il est mal protégé, mal pavé, inintéressant et même pas joli.
Nous le quittons sans regret au matin pour pointer sur un superbe récif dont l’exploration nous distrait de ce mouillage utile mais pas inoubliable.
Cet arrêt de jour au Carysfort Reef étanche notre soif de paysages remarquables. A l’ombre d’un phare vieillissant semblant régner sur une étendue de brisants, la faune sous-marine se révèle extrêmement riche de poissons divers et colorés qui frayent entre les coraux.
Après un si bel endroit, c’est une grande déception qui nous envahit quand notre tirant d’eau nous interdit l’accès du Caesar Creek Inlet où nous avions repéré un mouillage au sein d’un étroit bras de mer entouré par la mangrove. La frustration double d’intensité quand le premier choix alternatif se révèle impraticable pour cause de bouées de mouillage présentes sur les cartes mais absentes dans la réalité. Nous nous décidons finalement pour un pis-aller acceptable le long de la côte atlantique de Elliott Key. Exposé à l’Est et au Sud, l’endroit ne paraît pas des plus serein mais se révèle tout à fait fréquentable en l’absence de vent et de houle, prodiguant au petit matin une mer d’huile comme nous n’en avions pas vue depuis longtemps.
Cette mer (presque) sans rides nous accompagne jusqu’à « No Name Harbour ». Cette escale est attendue car elle nous est conseillé par Sam, illustrateur et navigateur à New York, élevé pour partie en région parisienne et que nous avions rencontré au Panama en compagnie de son titi parisien de cousin. Souvenez-vous !
Toujours est-il que l’endroit, au sein du parc naturel de Key Biscayne, est ravitaillé par les corbeaux et nous décidons de compléter notre exploration en annexe.
La promenade est longue, plus que de raisonnable, mais elle nous amène à découvrir un banc de sable squatté par d’innombrables « party boat » qui s’amoncellent dans un même endroit, véritable maelström de coques en plastique, de bruits, de musiques et de chair aviné.
Qu’elle soulagement après cette vision populaire de découvrir à deux pas de là un bras de mer tranquille où s’ébattent paisiblement un couple de lamantins que nous avons tout loisir d’observer.
De retour à notre mouillage, nous filons profiter du restaurant et profitons du soleil couchant pour entreprendre une visite du parc assortie de l’observation des inénarrables raccoons (raton-laveurs locaux).
Nous repartons dès le lendemain pour emprunter les waterways. L’idée de traverser Miami par les canaux résonne comme une promesse de grattes-ciels gigantesques aux milieux desquels nous emprunterions un canyon de béton et de verre. Hélas, les canaux ne traversent pas la ville en son centre et sont situés plutôt loin derrière les ensembles urbains du bord de mer, ne laissant aux regards des passants qu’une succession de zones tantôt industrielles, tantôt résidentielles, bien moins impressionnantes mais intéressantes tout de même avec finalement un bon nombre de petites îles inhabitées où il ferait bon se poser si nous en avions le temps et le bateau approprié.
Une seconde journée consécutive dans les waterways nous amène jusqu’à Fort Lauderdale, port de débarquement de notre invité et présumée ultime escale du voyage de Takoumi.
Toutefois, comme « présumer n’est pas réalité », nos aventures ne s’achèvent pas vraiment là et de notre découverte de Fort Lauderdale au baroud d’honneur de Takoumi, il nous reste encore quelques belles perles a conter.
Ah, ah, terminé, pas terminé, gros suspense…
la suite! la suite!
Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? on boit un coup, on fait le point et ça repart ? profitez bien de votre liberté, viva Takoumi’s crew !