La République Dominicaine « c’est le Far West » nous a-t-on dit au cours de la semaine que nous avons passée à Samana…Nous n’avons pas compris tout de suite, et pourtant, nous nous en sommes enfuis, un peu partagés entre le sentiment d’être accueillis chaleureusement à la mode latine, et malmenés par une bande de cowboys…
Samana est une ville sympathique et idéale en taille pour les plaisanciers, et pourtant, nous n’y étions pas bien accueillis et ne pourrions la recommander. Pour commencer, en arrivant de Puerto Rico dans la baie du Port Santa Barbara (de Samana), nous n’avons vu aucun moyen d’ancrer et aucun autre plaisancier. Nous avons tourné et fini par prendre une bouée libre sur les conseils d’un bateau local – bouée que nous paierons évidemment assez cher.
Samana et le « Bridge to nowhere »
Dix minutes plus tard, 6 hommes plutôt costauds ont débarqué à bord de Takoumi – dont un seul armé en uniforme de militaire. En trois minutes et sans aucune présentations, ils m’ont assaillie de questions tout en grimpant à bord, me bousculant pour aller littéralement se vautrer dans mon cockpit! Heureusement que la lecture du guide que nous avions téléchargé nous y avait préparé ! Ca fait tout de même un peu peur sur le coup, mais nous sommes restés calmes et avons bien-entendu cédé à toutes leurs demandes avec le sourire – y compris d’être dédommagés pour leur déplacement : le fameux « propuesto » reviendra souvent, en particulier concernant tout ce qui a affaire au plaisancier! Bon, il y a un bon côté bien que la procédure soit désastreuse : nous venions de passer la nuit en mer, et ils nous ont autorisé à aller dormir plutôt que de nous rendre immédiatement au bureau de l’Immigration, repos bien apprécié !
Aussi, le lendemain nous avions repris des forces sans savoir qu’il nous en faudrait. Nous avons commençé par attacher notre dinghy – tout pourri peut-être mais méritant ces derniers mois – au « muelle » ou ponton du port. Mais nous ne sommes pas tranquilles : ce ponton dangereux est fait pour de grands bateaux, et ne nous permet pas de sécuriser ou cadenasser notre annexe. Les « officiels » de la veille nous ont pourtant vivement conseillé de ne surtout pas oublier de le cadenasser…En fin de compte, l’annexe ne sera ni volée ni abîmée… Quelqu’un de bienveillant l’aura même attachée par l’arrière pendant notre balade, ceci pour contrebalancer sa fâcheuse tendance – que vous connaissez – à se retourner! L’entretien avec la gentille dame de l’immigration s’est bien passé malgré la centaine de dollars que nous coûte la taxe gouvernementale.
Nous avons décidé d’être prudents le matin suivant, et d’oublier le hors-bord choisissant de ramer péniblement jusqu’au muelle… Notre dinghy est pitoyable mais il est fidèle! Prévoyants, nous avons demandé au « vigilante » – le garde de sécurité militaire – de le surveiller et de nous trouver un service de « taxi-boat » envisageant de dîner en ville un soir. C’est ainsi que nous avons rencontré Mingo avec qui nous avons sympathisé tout au long de la semaine. Il nous attendait sur le ponton à notre retour ce jour-là et ça tombait bien, puisque le vigilante était rentré chez lui, et que notre annexe était tout simplement crevée!
Bonne nouvelle pour Mingo dont la mission avait grossi d’un coup pour le reste de notre séjour…sans compter que quelques jours plus tard, en quittant le site de los Haites, une manœuvre notablement foireuse et mal préparée a propulsé notre annexe fraîchement réparée sur des moules saillantes du ponton d’accueil mal adapté…
Triplement crevée nous peinons encore à la faire durer…
A noter aussi de ces deux jours en baie de San Lorenzo que chaque mouvement du bateau doit faire l’objet d’une démarche administrative auprès de la commandancia pour obtenir une autorisation de circulation appelée « despacho » est qui n’est délivrée qu’une demi heure maximum avant l’appareillage… Autant dire que si la destination est belle, ces démarches gênent drastiquement un simple allez-retour d’une vingtaine de miles.
Une après-midi, nous avons confié à Mingo la mission de nous organiser un tour en bateau de pêche pour nous approcher des baleines. C’est alors le « far west » jusqu’au lendemain matin, notre capitaine change trois fois en 24 heures et à 6h30 du matin, heure du RDV nous l’attendons une bonne heure. Je me suis alors heurtée avec le responsable (introuvable au départ) et j’ai demandé un dédommagement pour inverser quelque peu les rôles… Les discussions ont duré 48 heures et nous n’avons obtenu qu’une maigre excuse de la part du prestataire. Alors… le plus important était les baleines et elles sont fabuleuses bien que difficiles à approcher, même en puissant bateau de pêche!
Le dernier jour a Samana, nous n’avions plus qu’à régler les formalités pour quitter la ville, l’inévitable despacho, nous connaissions donc la procédure – et tous les militaires de la Commandancia de Samana à ce stade. Même si nous avons été surpris de constater qu’un despacho de départ « sans retour » n’est remis qu’une fois à bord par le (ou les) représentant(s) de l’armée chargé(s) de nous raccompagner jusqu’au bateau…
Les choses auraient dû se passer simplement, mais au dernier moment, nous étions attendus sur le muelle par une autorité portuaire « surprise » pour nous piquer encore quelques dollars…Il s’agissait de payer le fait de nous être arrêtés dans ce port… en plus de la bouée, règle aléatoire et clairement remise en cause dans notre guide…
Heureusement que pour clore notre séjour, la douane, la cellule narcotique et les militaires de la Marina Oceanworld de Puerto Plata, notre comité d’arrivée et de départ, ont été courtois et respectueux, y compris pendant la fouille du bateau, et n’attendaient pas de propuesto, seulement 20 dollars pour un dernier despacho afin de pouvoir quitter l’île. Et malgré cette ultime expérience indolore, nous avons conclu que la jolie République Dominicaine n’est pas adaptée à la navigation du plaisancier – et qu’il vaut mieux la visiter par la terre.
C’est effrayant ! Il vaut mieux, hélas, passer au large de ces contrées.
Après X ème relecture, je crois que je vais lancer une collecte sur Internet pour votre pauvre dinghy. Je me demande si la participation collaborative, très à la mode en ce moment, marcherait……