30 déc.
L’Atlantique comme le saut à l’élastique. On débranche son cerveau et on saute.
Nous sommes partis par beau temps et bon vent. GV 2 ris et génois partiel.
Mais une fois au centre de la passe entre Sao Vincente et San Antao, on s’est fait surprendre par le couloir d’accélération du vent dans lequel nous pensions déjà être… Rafales à 40 nœuds… On affale la GV vite fait bien fait et on enroule encore un peu de génois…. Ça nous rappelle à notre bon souvenir qu’on ne parts pas pour déjeuner aux îles.
Après un bon moment, tout est réglé propre… Toujours autant de vent.
Je m’accorde une sieste, interrompue quelques dizaines de minutes plus tard par …. Une vraie pétole, d’un coup d’un seul…
Certes, il reste un peu de vent, mais il viens du nord ouest …. On avance donc au près, c’est original pour une croisière dans les alizés …
Mais le vent faiblit encore et le génois bat, rague et se déchire sur la barre de flèche, elle commence bien cette transat…. Nous avons encore le choix… Retourner a Mindelo ? Je ne pense pas y trouver un bon voilier… Réparer ? Nous avons ce qu’il faut à bord… Aller se mètre au mouillage de San Antao pour réparer au calme ? … Finalement, nous ne quittons pas notre route réparons sur place la déchirure de 25 cm avec adhésif magique et speedy stitcher … Beau travail, long et pas facile, mais résultat honorable… Nous n’aurions pas beaucoup mieux fait au port finalement.
Mais réparer une voile, c’est bien, mais ça ne fait pas revenir le vent dont les rares frémissements viennent du sud-est maintenant, de plus en plus improbable …
On essai tout pour ne pas allumer le moteur ni abîmer notre réparation, dérive face au vent, arrière aux vagues, dans la bonne direction… Rien. N’y fait, finalement, on remet le moteur pour 1 heure, nous verrons bien !
31 déc
La première nuit est passée sans douleur. Beaucoup de vent finalement et des vagues qui, parfois, déferlent sur la coque selon un angle malvenu.
La lune nous accompagne cette fois, elle apparaît vers une heure du matin pour éclairer une belle nuit sans nuages.
La journée, génois déroulé est plus efficace, mais les vagues restent impressionnantes quand même. Et puis encore une fois, qu’est ce que c’est désert la mer …
Nous ouvrons une bouteille de vin blanc des Canaries offerte par Tota pour le denier apéro de l’année et le dîner du réveillon. Nous profitons de cette occasion pour exploser la bombe de confettis, trompette, déguisement et boules de papier apportée à bords par Myriam et Stéphane avant notre départ…
Le dîner est donc largement amélioré du quotidien, foie gras sur toast, chapon au champignon. Par contre rien d’exceptionnel n’est prévu pour le confort et la praticabilité de la table. Le dîner de réveillon du nouvel an est aussi difficile à dompter que n’importe quel autre. Peut être un peu plus même, dans la mesure où nous avons essayé d’utiliser des assiettes plates que nous trouvons bien plus jolies 😉 Mauvais plan pour un plat en sauce … le chapon sera donc finalement servi dans des assiettes à soupe en plastique 😉
La nuit est un poil plus calme que la précédente, il ne fait aucun doute que nous commençons à nous y faire en fait.
1 Jan
Magnifique soleil pour ce jour de l’an et des confettis en forme de cœur épars dans le cockpit 😉 On va voir combien de temps ils résistent 😉
Quelques Sms de Noël nous apporte un bon soutiens et des encouragements.
Donc « on remet les watts » – on déroule le génois en grand en fait – et c’est repartis.
Nous allons même jusqu’à tester notre générateur pour recharger les batteries… Bon, la première mise en œuvre est fastidieuse, il y a de l’essence, mais pas assez en fait, et le roulis fini toujours par désamorcer l’arrivée d’essence. Ensuite, des que nous branchons le générateur a la prise de bords, il part en « vrille », ou plutôt en surcharge. La solution sera de brancher directement le chargeur au générateur, mais quel branchement stupide au sein du bateau peut bien provoquer cette surcharge ? Je préfère penser que notre rallonge est si « pourrie » qu’elle génère une forte résistance rien qu’en existant… Ou peut-être ai je inverser la polarité des fils en montant mon adaptateur maison ? Ce serait curieux, depuis toute prise de quai, la polarité n’a aucune importance normalement… Bon je verrais bien un jour si j’ai la possibilité de faire des tests… En même temps, nous ne sommes pas pressés de retenter l’expérience, l’engin fait un boucan du diable et rends immédiatement tous points du bateau impropre à la vie humaine … Et pour pas grand chose en plus, en une heure, la charge est faible … Le « bidule a bruit » sera donc réservé à un usage de secours … Ou peut-être pour faire fuir des voisins au mouillage ?
Dans le même temps, la préparation du déjeuner nous réserve un très, mais vraiment très, vilaine surprise … Le pilote épanche son huile sur l’égouttoir à vaisselle 🙁 Sans pilote, c’est cuit pour la traversée idyllique, déjà que les vagues nous font la misère, alors si nous devons barrer en plus de ça…
Le déjeuner est donc expédié pour laisser place à la recherche d’une hypothétique documentation qui nous ne retrouvons pas et qui n’a peut-être jamais existé, dommage, j’aurai au moins aimé savoir à quoi peut bien servir cette huile des ce mécanisme. Nous nous retournons donc directement vers l’objet de nos craintes pour l’ausculter et la fuite semble provenir d’un écrou borgne qui doit sans doute maintenir un axe à l’intérieur du corps en métal. Dans un premier temps, resserrer l’écrou nous donne de l’espoir et une bonne heure de relative quiétude en attendant une ultime vérification qui révèle l’inefficacité de la manœuvre… Qu’à cela ne tienne, le but est de permettre au pilote de conserver l’huile qui lui reste et dont nous ne comprenons toujours pas l’usage, alors ainsi soit-il et nous nous « risquons » à utiliser du sikaflex pour circonscrire l’hémorragie sous une copieuse et honteuse couche de « produit du diable » qui, je le rappelle présente avant tout l’extraordinaire faculté de se coller partout sauf où tu le prévois. Heureusement, notre désormais solide expérience de ce joint-colle nous permet de nous tirer honorablement de cette tâche. Reste à savoir qui de l’huile ou du sikaflex aura le dernier mot. A l’heure tardive ou j’écris ces lignes, il semble que l’affreuse pâte blanche ai pris le dessus sur l’insidieuse huile fine. C’est déjà ça de pris.
Entre temps, il a aussi fallu s’occuper de l’alternateur d’arbre, soit disant contrôlé à Palma de Majorque, ce dernier fait lui aussi sa petite crise. Mais là, c’est plus simple, le montage subit de telle contrainte qu’il semble se déformer a l’usage, il nous faudra contrôler régulièrement son attache pour conserver une tension « d’usage » à la courroie. On a eu un peu de chance, au début, je pensais que l’alternateur lui même se déformais. C’est peut-être vrais, mais temps qu’il suffit de retendre la fixation autant qu’il est possible, moi, ça me va.
Et voilà terminée les péripéties mécanique de la journée. Mais comme on est en manque de veine en ce premier de l’an, notre repos pourtant bien mérité est méchamment mis à mal par une soudaine montée en force du vent et des vagues associés à l’apparition de menaçants nuages sombres qui nous prédisent une nuit noire ou presque, ainsi qu’un dîner agité.
A ce moment là, je me pose la question de savoir si notre transat est une transat « normale » jusque là. Et si c’est bien le cas, ce qui peux pousser autant de gens à revivre cette expérience plus d’une fois dans leur vie…
Et a l’heure tardive ou j’écris ces dernières lignes, bien qu’un calme relatif soit revenu, il s’accompagne encore de quelques rafales, histoire de nous souvenir s’il était possible de l’oublier « qu’on est pas en vacances ici … »
2 Jan
Super journée, beau temps, bonne température, vent soutenu et vagues sinon raisonnables au moins praticables.
Le pilote va bien, il ne présente pas de signe de fatigue et l’odieux plâtrage au Sikaflex a arrêté l’hémorragie. Le générateur d’arbre génère du tonnerre 😉
Dommage que la nuit qui suit soit aussi chaotique. Des la nuit tombée, le vent qui se renforce, je veux bien, mais les vagues qui vont avec, je n’en veux pas, merci bien.
3 Jan
Encore une superbe journée hormis quelques nuages en matinée, juste la reprise de la fuite du pilote, encore du Sika, et encore quelques fuites. Mais cela semble négligeable maintenant … À surveiller de près.
Par contre, encore un début de nuit difficile et agité. Pourtant, moins de vent que notre ordinaire, mais les vagues … Ah, les vagues !
Et puis, au réveil d’un quart de repos, c’est la guerre dans le cockpit, plus de 30 nœuds, génois enroulé suffisamment pour être comparé au top d’un bikini tropezien, la situation demeure chaotique. « Y a pas l’choix », les yeux et l’esprit encore voilés par les brumes du sommeil, l’affalage sauvage de l’artimon rends immédiatement sa sérénité à l’embarcation … Par contre, « on se traine », mais confortablement.
4 Jan
Bon, nous ne nous sommes pas traîné confortablement bien longtemps et la nuit se révèle aussi agitée que les autres. Du coup, au réveil, un net déficit de sommeil, que j’entreprends d’aggraver aussi sec par une tentative, sans réussite, de mise en place d’un ris pour l’artimon. Le déjeuner nous trouve exténués.
Dans l’après midi, nous finissons par trouver un équilibre du tonnerre pour le génois seul un peu enroule mais pas trop. Nous en serons gratifiés d’une pointe de vitesse à presque 12 nœuds, et dans un confort acceptable.
Mais la nuit s’annonce, et comme à notre habitude, nous réduisons encore pour éviter d’être surpris. Bien nous en prends, car comme à son habitude, le vent redouble d’effort une fois le soleil couché … Et c’est encore une nuit de folle « cavalcade » qui se présente avec des rafales à pas moins de 30 nœuds apparents, soit presque 40 nœuds de vent réel … Un vrai rodéo où boire un café sans le renverser est une gageure.
5 Jan
J’ai pris la météo aujourd’hui, le rodéo va bientôt cesser … Mais la belle vélocité aussi. Pas grave, nous avons le temps et un peu de confort ne nous fera pas de mal.
Est prévu ces prochains jours:
– Une première accalmie demain soir mercredi, le vent moyen passera de 20 nœuds (tu parle, 25-30 oui) a 15
– Samedi et dimanche par contre, c’est pétole ou presque. Notre moyenne va en prendre un sale coup.
6 Jan
A l’usage, c’est dés le matin que le vent et les vagues se calment. Dans un premier temps, cela nous réconforte et les conditions de vie s’améliorent. Manue va pouvoir pêcher un superbe poisson qui constituera notre dîner.
Par contre, nous nous rendons compte assez vite que cet adoucissement va déjà porter un coup sérieux à notre capacité à arriver avant nos meilleures prévisions établies sur les performances records de ces derniers jours. Maintenant, je redoute vraiment la pétole prévue ce weekend end. Nous verrons bien.
Entre le 6 et le 7 Jan
A 07h50 ce 7 janvier 2016, nous avons franchi le méridien au centre de notre traversée.
Désormais, la distance au but devient plus faible que la distance à l’origine.
À définir si à cet instant précis, il ne reste à parcourir que la moitié où si la moitie a déjà été parcourue 😉
Dans tous les cas, nous n’avons jamais été plus loin de toute terre qu’à ce moment là !
7 Jan
Jour de calme, nuit de « grains », comme d’hab’ quoi.
8 Jan
Belle journée pour notre traversée, bien que très chargée en formations nuageuses. Et encore une fois, la nuit se révèle chahutée.
Grande nouveauté, cette fois, nous avons conservé la grand voile à deux ris plutôt que le génois. Dans cette nuit noire cette configuration est loin d’être performante, mais le confort est meilleur et la stabilité globale grandement améliorée. Et surtout quel confort de ne pas avoir à se préoccuper de l’absence de vent grâce à la retenue de bôme installée, ni du risque d’empennage grâce au « mode vent » du pilote automatique.
Bon maintenant, il nous reste à trouver quelque chose contre la pluie 😉 La veste de quart, c’est top, mais les températures sont douces ici et c’est dommage de s’enfermer dans un vêtement aussi chaud.
Un seul bémol … Mais de taille, nous ne nous dirigeons pas vraiment la ou nous devrions… « La faute aux grains » qui génère en leurs sein une rotation des vents qui ne nous est vraiment pas favorable.
9 Jan
Peu à peu, le calme s’invite à notre navigation. La mer est encore un peu agitée, mais les soubresauts du bateau sont de moins en moins gênants. Et puis, nous avançons encore bien malgré la chute de vent annoncée.
Nous sommes toutefois soucieux de notre capacité à continuer à un rythme correct car la météo que nous avons consultée aujourd’hui prédit deux jours de très grand calme dimanche et lundi. Enfin, nous verrons bien.
10 Jan
C’est tout vu. Si cette journée s’est déroulée sous un ciel superbe et un très chaud soleil, malgré un temps de demoiselle, nous avions quand même de quoi avancer sinon en fanfare, au moins convenablement.
Pour moi, l’après midi est à l’établissement du record de siestes de la traversée. Elles ne sont entrecoupées que par quelques bricolages.
Entre autres, un nouveau collage a la super glue bon marché du bol en verre de la cafetière Bodum que j’ai brisé avant hier et que Manue a cassé de nouveau hier soir. Cette séance de collage est une presque réussite, aucune nouvelle tâche de colle à côté et aucune nouvelle coupure aux mains c’est au moins deux choses de mieux que la première tentative;-), à défaut d’avoir recollé les morceaux aussi proprement ;-(. Bon, nous sommes d’accord, la colle cyano ne va pas donner de résultats extraordinaires sur le verre (pour peu que ce soit bien du verre, je trouve la matière, comment dire … curieuse), mais je n’en attends qu’une résistance de quelques jours, histoire de terminer la traversée.
C’est au crépuscule, alors qu’une relative fraîcheur nous sort de la torpeur de notre lascive journée, que la pétole annoncée nous cueille au dépourvu. Une telle absence de vent n’était prévue que le lendemain !
Nous avançons donc au moteur, dans la nuit, sur une mer d’huile. Surprenante condition de la surface de l’Atlantique pour nous qui avons connus au début de la traversée des montagnes liquides qui déferlaient plus haut que nos têtes.
Pour le coup, c’est une torture d’avancer au moteur, nous aimerions tellement profiter de la quiétude de cette période de calme plat … mais nous laisser dériver deux jours ne nous tente pas plus que ça car la zone de haute pression pourrait s’éterniser sur place et nous de même, jusqu’à ce que vienne nous cueillir la perturbation qui devrait venir du nord avec son cortège de grains, de pluies et de coup de vent dans un environnement nuageux. Nous choisissons donc de tracer notre route au travers de cette bulle de haute pression avec l’espoir d’en sortir plus vite que nous y sommes entrés et de trouver de l’autre côté une nouvelle dynamique de vents favorables.
Dans la nuit du 10 au 11 Jan
Péripétie ultime pour cette journée du 10, quelques dizaines de minutes avant la fin de mon quart, le pilote automatique accuse un sérieux coup de pompe, puis reprends son travail. Ce n’est qu’au début du quart de Manue qu’il se décide à abandonner son poste sans même un dernier râle …
Bon, nous ne sommes plus qu’à 600 milles du but plus ou moins, la situation est beaucoup moins critique que s’il avait lâché au début du trajet. Nous pouvons barrer sur cette distance, nous arriverions lessivés, courbaturés sans aucun doute avec les yeux rouges de fatigue, certes, mais nous arriverions.
Nous préférons quand même lui/nous donner immédiatement une chance et nous rendons séance tenante au chevet du malade, sur le coup de 4h du matin UTC soit peu ou prou au milieu de la nuit.
Pas de température, l’hémorragie d’huile n’est plus qu’un souvenir que seul l’odieux plâtre de Sika révèle, aucun bruit mécanique, donc rien n’explique ce brutal abandon de poste …
Dans le doute, et bien que les symptômes soient différents, nous entreprenons de changer la pièce électrique qui avait déjà fait défaut en Sicile. Le choix est hasardeux, comme un diagnostic de « Dr House », mais c’est de toute façon le seul traitement pour lequel nous disposons d’une prothèse de rechange.
Heureusement, je commence a bien connaître les entrailles de la bête et en moins de 15 minutes chrono, le patient est ouvert, opéré et refermé. Plus rapide que l’opération d’un furoncle dans « Greys Anatomy » … Et ça marche !
Immédiatement après son réveil, le pilote est remis au travaux forcés, peut-être pas à perpert’, mais il doit nous donner encore quelques jours de services avant de pouvoir être sérieusement révisé.
Du coup, une pièce qui tiens moins de 6 mois justifie pleinement les deux de rechanges que le « réparateur » nous avait vendues en plus de celle remplacée. Mais 6 mois de durée effective, je trouve ça court pour une pièce que l’on trouve dans toutes les automobiles et dont personne n’entends jamais parler …
11 Jan
Superbe journée, soleil brûlant, ciel bleu et calme plat. Ce ne sera pas une bonne journée pour notre moyenne, mais là n’est pas le sujet du jour.
Car aujourd’hui, nous prenons un bain de mer au beau milieux de l’Atlantique … Expérience « surréaliste » s’il en est, j’avais bien peur que les conditions ne fussent réunies avant la fin de la traversée et c’est quelque chose que j’avais tant envie de faire que nous ne boudons pas notre bonheur.
Cette journée magique est comble pour Manuela quand elle pêche une nouvelle dorade coryphène de belle taille après 2 jours à ne remonter que des algues. Voilà une pêche que j’apprécie aussi, car la totalité de la manœuvre (pêche, remontée, nettoyage du poisson et découpage des filets) s’est déroulée pendant ma sieste 😉
12 Jan
Pas grand chose à dire de cette morne journée où la grisaille d’un ciel nuageux occulte le soleil et sa chaleur.
Par contre, la soirée et une bonne partie de la nuit est sous le sceau de l’équilibre et des performances sous voiles. Quel plaisir de ressentir la puissance et la douceur dans chaque accélération du bateau qui, travers au vent et à une douce houle, évolue dans un ratio de 6 nds de vitesse pour 11 à 12 nds de vent.
C’est au moment précis où Manue prends son quart que le vent monte sous d’invisibles nuages cachés par la nuit noire. Les performances sont toujours au rendez vous, mais l’augmentation des forces en jeux instille l’inquiétude et dénie les sentiments de confiance et de sérénité de mise jusque là.
13 Jan
C’est un fait que la nature même de ce que nous sommes en train de vivre nous interdit de considérer un jour comme « banal » … Il ne se passe pourtant pas grand chose aujourd’hui.
Je sais que nous sommes encore « loin » de notre destination, mais nous ne pouvons réprimer un sentiment de « nous arrivons bientôt ». Peut-être que 2/3 jours paraissent être une durée « humainement acceptable » au regard des 14 derniers jours ? Ou encore cette impression est-elle renforcée par la lecture des cartes électroniques qui peu à peu nous permettent de distinguer de plus en plus de détails des îles sur le même écran que notre position ? N’est-ce pas aussi le fait que suivre un bon cap a plus d’importance qu’il y a quelques jours ?
Quoi qu’il en soit, je me suis surpris une ou deux fois à réprimer une pensée ou une autre en fonction du vieil adage qui veut que rien ne soit acquis tant que la ligne d’arrivée n’est pas franchie …
Il va pourtant bien falloir réfléchir à ce que nous allons faire ensuite … Mais dors et déjà, nous aspirons surtout à profiter d’une ou plusieurs siestes géantes !
14 Jan
Une fois de plus, une journée ni très confortable, ni très performante. Selon la météo, c’est demain que nous devrions accélérer pour une dernière portion que nous espérons … en ligne droite, ce qui n’est jamais une évidence.
Et en fait, c’est en pleine nuit que l’accélération survient, comme souvent, au début du quart de Manuela vers 4 heure du matin. Les performances et le confort s’améliorent quelque peu avec la vitesse, mais quelques gouttes de pluie s’invitent à la fête. C’est dommage parce que les plus de 26 nds de vent au portant seraient grisants s’ils s’accompagnaient d’un fond de l’air chaud et sec. En général, j’aime bien lire depuis le cockpit, mais la, c’est un peu casse pieds de ne sortir du carré que pour une trilogie qui peine à se renouveler « tour de veille / pluie / clope ».
Encore aujourd’hui, j’essaie, sans grande réussite, de repousser les pensées liées à l’arrivée, sans doute après demain. Et une nouvelle idée, que je peine à ignorer, viens de faire irruption, à partir de quand verrons nous les premiers signes de la terre ? Au soir ? Dans la nuit ? Ou bien seulement au matin ?
Et immédiatement d’y associer l’image imaginée et curieusement divertissante d’une vignette de bande dessinée représentant la vigie numide des pirates d’Asterix le Gaulois dans son baquet criant dans sa bulle « Te’we, Te’we, je vois la Te’we » !
15 Jan
La journée est plutôt calme, nous n’avons même pas daigner renvoyer le ris pris la nuit passée. Non pas que le vent soit fort, mais nous n’avons pas cherchés à aller plus vite que ça. Peut-être une sorte d’accord tacite ou inavoué pour ne pas arriver trop vite … En même temps, il est vrais que nous ne souhaitons pas approcher l’île de nuit.
Cette nuit d’ailleurs qui nous réserve une ultime série de pluies légères et un cap mauvais comme il n’est pas permis, comme pour nous rappeler que même si nous l’avons franchi, c’est l’océan qui commande ici.
Puisqu’il s’agit sans doute de la dernière nuit de notre traversée, Il y a un peu de stress a l’approche des terres que nous ne distinguons toujours pas. J’espère être éveillé quand les côtes de la Martinique se révéleront à nos yeux.
16 Jan
Cette fois ça, nous y sommes … A mon réveil, nous voyons la terre, où plutôt, ses lumières car nous sommes encore en pleine nuit.
Mais comme de bien entendu, rien n’est jamais facile ou acquis en mer, et c’est une multitude grains qui nous accueillent. « Et bien, comment dire ? Vous êtes certains qu’il fait beau temps en Martinique ? ». Même quand Manue va se coucher, ils ne disparaissent pas, ce qui est étonnant car depuis quelques nuits, elle a une « poisse météo » quasi divine et je m’étais habitué à ce que le mauvais temps lui soit réservé 😉
Bah, ce n’est pas bien grave, bien moins en tout cas que la barrière d’orages qui nous avait interdit l’accès direct à Stromboli. Alors, restons zen, sans chercher la performance et en restant aussi éloigné de la côte qu’il est raisonnable, avec l’aide du vent qui balaie les nuages, nous parvenons à nous faufiler au moins entre les plus gros qui se retrouvent entre l’île et nous.
Enfin, peu à peu, le jour dévoile les pentes verdoyantes de la Martinique et rends notre arrivée imminente de plus en plus « palpable ».
Arrivée que nous avons finalement prévue au mouillage, et non au port. Pour éviter le stress, la foule et les inévitables errements d’un port surcharge.
Bien entendu, cela ne sera pas sans une ultime péripétie. Au hasard d’une manœuvre de pont imprévue, Manue en profite pour aller prendre un bain de mer … Toute habillée qui plus est. Elle est vraiment incorrigible 😉 Je dois reconnaître que, de là où je l’observe, la cabriole par dessus le garde fou est belle, comme une artiste de cirque aurait soignée sa sortie. Heureusement, les conditions sont calme à l’abri de la pointe Salines et de L’Islet Cabri et notre vitesse est faible. J’ai donc le temps de lui jeter la bouée de sauvetage et le feux a retournement. Le reste s’enchaîne presque naturellement, large de mi tour, mise à la cape au vent de la naufragée, déploiement de la plateforme de bain et de l’échelle. Il faudra quand même deux tentatives pour récupérer à bord une Manuela toute mouillée 😉 et pas plus traumatisée que ça.
Quelques dizaines de minutes plus tard, les manœuvres de mouillage marquent la fin de la grande traversée.